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S01E05 - D'Ivän à Esther - Transcription


TRANSCRIPTION


Le but de ce site est de rendre le podcast accessible à tous.tes mais principalement aux personnes qui ne peuvent pas accéder pleinement au contenu audio.

Nous avons privilégié une lisibilité optimale et  tenté de respecter au maximum les pronoms alternants en fonction des réponses.


(bref on a fait au mieux)


S01E05 - Esther
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La Queenterview - S01E05 - D'Ivan a Esther - La Queenterview
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La Queenterview : Pour terminer…

Esther : Ah, ce n’est pas fini.

La Queenterview : … tu dois dire « La Queenterview » à ta manière.

Esther : Juste « La Queenterview » ?

La Queenterview : Ouais, juste « La Queenterview ».

Esther, avec un air chantant : La Queenterview ! Oh yeah !

La Queenterview : J'ai l'impression qu'aujourd'hui on ne fera pas de « tu préfères », qu'on va faire que des « La Queenterview ».

La Queenterview : Alors vas-y.

Esther : Roh, là là.

La Queenterview : Non, je sais, c'est hyper dur.

Esther, avec entrain : La Queenterview !

Esther rit aux éclats.

La Queenterview : Est-ce que tu peux me faire une autre proposition ?

Esther, dubitative : La Queenterview ?

La Queenterview : Oui, mais là c'est toi, là ce n’est pas Esther.

Esther : Bah, je ne sais pas moi.

La Queenterview : Tu vois là, tu reviens en Esther.

Esther : Ah là c'est moi ? Ah, OK.

Esther marque un temps.

Esther : 1, 2, 3…

La Queenterview lance son générique de début.

Esther, sensuelle : La Queenterview.

La Queenterview : Pas mal. Celle-ci sera montée.

Esther : Trop bien.

Esther pouffe de rire.

La Queenterview : Hello à toustes et bienvenue dans La Queenterview !

La Queenterview, qu'est-ce que c'est ? C'est un podcast d'interviews libres, ouvertes et inclusives qui vous ouvre les portes du monde merveilleux des artistes queers : Drag Queen, Drag King, Drag Queer, Club Kid, plus l'infini et au-delà. Ici, on parle vie de Drag, de vie out of Drag, de construction artistique, de processus créatif. Je m'appelle biiip et je suis toujours aussi curieux.

Aujourd'hui, pour ce nouvel épisode de La Queenterview, j'ai décidé d'aller à la rencontre d'une artiste Drag qui se vante d'être le cul de Paris. C'est vraiment l'endroit parfait, un podcast, pour vérifier cette information. Dans ses performances et dans ses looks, elle mêle l’humour et son amour du burlesque et du cabaret. Elle organise, une fois par mois, à Bastille, un événement qui s'appelle « Le Boudoir d'Esther ». Ah bah voilà, trop tard, j'ai dit son nom.

Bienvenue pour ta Queenterview, Esther !

Esther : Bah… bonjour !

La Queenterview rit.

La Queenterview : Bonjour Esther ! Bon, alors est-ce que c'est vrai cette rumeur, parce que j'ai regardé sur ton compte Instagram : est-ce que tu es vraiment le cul de Paris ?

Esther : Alors le titre a été mis en contestation récemment par une certaine Mami Watta, mais je dirais que oui, je suis toujours le cul de Paris. Je suis le cul padé de Paris, voilà. Parce que le cul de Mami Watta est fort… fort sympathique, mais… sauf qu'il est totalement réel. Alors que moi, il est faux. Et je trouve que la… la mousse de Paris a son titre à défendre.

La Queenterview : « Padé », qu'est-ce que ça veut dire « padé » ?

Esther : Alors « pader », en gros, c'est utiliser de la mousse, généralement c'est de la mousse de canapé, que tu découpes en formes pour pouvoir créer des hanches. Parce que voilà, la différence un peu entre une morphologie masculine et féminine, c'est les hanches d'une femme. Et moi j'en mets beaucoup parce que j'ai des larges épaules qui sont un peu « mastocs », merci la natation et le kayak. Mais du coup, ce qui fait que je pade énormément pour pouvoir compenser et faire une hourglass figure.

La Queenterview : J'ai envie de dire : les gens iront voir sur tes photos pour ceux qui… ceux et celles qui ne te connaissent pas. Et effectivement, ce cul n'est pas inintéressant.

Esther : N'est-ce pas ? N'est-ce pas ? Et pourtant je trouve qu'il n'est pas assez mis en valeur sur mon Instagram. Il faudrait que je fasse, je pense, des gros plans de mon uc (ndlr : « cul » en verlan) pour que les gens comprennent réellement, parce que ça choque les gens. À chaque fois que les gens me voient en vrai, ils font « ah ouais d'accord, ok », « putain ça m'impressionne à chaque fois ».

La Queenterview : Peut-être qu'en fait il est tellement… il est tellement important qu'il mériterait son propre compte Instagram.

Esther : Mais je pense aussi, mais même moi parfois il m'impressionne, parce que quand je suis obligée de me faufiler entre les gens dans les foules et tout ça, c'est le cul en mousse qui prend, à chaque fois. Je n'ai pas l'habitude.

La Queenterview : Bon, maintenant qu'on a parlé de tes fesses…

Esther rit aux éclats.

La Queenterview : … j'aimerais que, avant qu'on vienne à parler d'Esther et de l'esthétique d'Esther, j'aimerais qu'on parle de toi, d'Ivän… Yvan ?

La Queenterview tente différentes prononciations : [ivan] ; [ivɑ̃].

Esther : Ivän. ([ivan], ndlr)

La Queenterview : Donc, Ivän.

Esther : Oui.

La Queenterview : Ivän, parle-moi de toi, d'où tu es originaire ? Pourquoi ce prénom ? Je veux tout savoir, Ivän.

Esther se met à chuchoter.

Esther : OK, d’accord, super. Alors je vais le faire en ASMR…

Esther cesse de chuchoter.

Esther : Non, je déconne. Alors, bah écoute, je viens de Bretagne, du fin fond du trou du cul de la Bretagne, Finistère, big up à mes Bretons out there. Mon père est Anglais, ma mère est Française. Alors pourquoi je m'appelle Ivän ? Alors ça c'est une histoire… bon voilà, j'en fais un stand-up dessus, tellement c'est ridicule. Mes parents étaient en vacances en Tchécoslovaquie, et ils ont entendu une meuf gueuler « Ivän » dans un parc et ils ont fait « oh my god, c'est parfait ».

La Queenterview rit.

La Queenterview : OK !

Esther : Et après, ma mère étant enceinte, elle est allée vomir dans un buisson, ce qui est un super signe, je trouve.

La Queenterview : Juste après avoir entendu ton prénom.

Esther : Exactement. Ils ont choisi mon prénom et après elle est allée dégueuler dans un buisson. Et si j'étais né une meuf, ils m’auraient appelée « Leeloo »… voilà, comme dans Le Cinquième Élément.

La Queenterview : Leeloo Dallas Multipass.

Esther : Leeloo Dallas Multipass, exactement ; donc la frange orange arrive bientôt.

La Queenterview : Et tes parents, ils étaient Profs, c'est ça ?

Esther : Oui, mes deux parents étaient Profs. Maintenant, ils sont à la retraite. Mon père était Prof d'Anglais en université, ma mère Prof de Sport, collège et lycée.

La Queenterview : D'ailleurs, je ne t’ai pas demandé, mais c'est quoi tes pronoms ? C’est… je m’adresse à toi…

Esther : C'est « il ».

La Queenterview : Et Esther ?

Esther : « Elle ».

La Queenterview : Très bien.

Esther : Mais en vrai, je navigue entre les flots. Je me nomme au féminin hors Drag de façon très récurrente. Je me nomme au masculin en Drag de façon très récurrente. Gender is a construct.

La Queenterview : Comment s'est passée ta scolarité ? Comment, en gros, tu as grandi ? Est-ce que t'avais des potes, tout ça ?

Esther : Des potes ?

Esther feint de rire.

Esther : Non. Ça, c'était bien le truc du... Tu sais, le petit garçon un peu sensible, un peu féminin, et cetera, dans le trou du cul de la Bretagne, ça ne faisait pas forcément effet auprès de mes semblables. Donc, non, j'étais très seul. D'ailleurs, j'ai appris des années plus tard que ça a beaucoup inquiété mes parents. Je n’en étais pas forcément conscient sur le moment, mais, ouais, mes parents m'ont dit qu'ils avaient très peur, un petit peu, pour moi. Et ils étaient en mode « mais il va être seul toute sa vie, cet enfant ». Donc, non, peu de potes.

Au collège, je me souviens, en Cinquième, je passais mes récrés à juste marcher en boucle dans la cour de récréation, pour être toujours en mouvement et pas être tout seul dans un coin. Ou sinon, c'était le CDI. Mais ça, c’est… voilà, je pense que beaucoup de petits homosexuels se retrouvent dans l'histoire du CDI. Voilà, comme on se réfugie dans les bouquins pour pas avoir à faire face au monde extérieur. Au fur et à mesure, si, vers le lycée, j'ai commencé à vraiment avoir des potes, et cetera. Des potes que j'ai encore aujourd'hui qui sont très, très, très, très forts dans mon cœur.

La Queenterview : Tu avais conscience de ta solitude et de pourquoi tu étais seul ?

Esther réfléchit.

Esther : J'avais conscience de ma solitude, ça oui. Oh là là, quelle question, my god. Est-ce qu'on est en thérapie ? Qu'est-ce qui se passe ?

Esther : Oui, j'étais conscient de ma...

La Queenterview : Je suis très curieux.

Esther : Je vois ça.

J'étais conscient de ma solitude. Est-ce que j'étais conscient de à quel point j'étais seul ? Non, mais j'étais conscient que j'étais seule, mais c'est surtout parce que jusqu'au lycée, je n’avais rien vraiment pour comparer. Donc, c'était ma vie. Et je voyais celle des autres autour de moi, mais je n’avais rien à comparer émotionnellement parlant. Je me suis raccroché aux gens que je pouvais, aux jours où ils m'aimaient bien. Bon, voilà, on a essayé de se faufiler comme on pouvait.

Est-ce que j'étais conscient de pourquoi ? Bah, du vraiment « pourquoi ? », non, parce que c'est très flou quand on est enfant. Je pense que même eux, il n'y avait pas forcément de « ah il est… ». C'était plus « bon, on n'a pas les mêmes centres d'intérêt ». Voilà, enfin. En Primaire, tout ce que je voyais, c’étaient les autres garçons, ils jouaient au foot, ça se mettait en cercle pour montrer sa bite. J'étais en mode « oh my god », « what the fuck ? ». Et donc moi, je préférais rester dans mon coin. Les meufs, elles étaient en mode « oh non, pas un garçon ». Donc voilà, on faisait du karaté sous le préau tout seul contre un mur, et puis c'était très bien.

La Queenterview : Qu'est-ce que tu découvres, aussi, à cet âge-là ? Qu'est-ce qui te permet un peu de t'exprimer ? Est-ce qu'il y a des choses auxquelles tu te raccroches ?

Esther : C'est vrai que du coup, je me suis beaucoup raccroché au… au côté artistique de la chose, même si je faisais pas mal de sport aussi, mais c'était vraiment tout ce qui était artistique, où je me suis vraiment plongé dedans, et surtout bah… le théâtre. J'ai fait du théâtre du plus, enfin voilà… du plus jeune que je m'en souvienne.

Même quand... Alors quand j'étais petit, on allait voir beaucoup de pièces de théâtre locales avec mes parents. Et ce que je faisais, c'est que j'allais voir la pièce de théâtre, je rentrais chez moi et j'essayais de tout réécrire de tête. Et ensuite, je harcelais les quelques personnes qui me parlaient, dans mon école, et j'essayais de recréer la pièce de théâtre dans la cour de récréation. Ça n’a pas duré très longtemps parce que tout le monde disait que j'étais un dictateur, mais bon, ce n’est pas grave. Mais du coup, ouais, je me suis vraiment plongé dans le théâtre.

La Queenterview : Ils avaient raison ?

Esther : Ouais, à l'époque, de ouf !

La Queenterview : Qu'est-ce que t'aimais dans le théâtre ? C'était quoi qui te plaisait sur la scène, sur l'impro ? C'était quoi que t'aimais ?

Esther : Bah… je suis un peu une diva, au fond, quoi. Tu vois, il y a cet aspect dramatique qui avait besoin de s'exprimer, ce côté un petit peu rocambolesque. Et du coup, le théâtre, ça me permettait de faire ça. Ça me permettait... En fait, je pense que, dans ma vie de tous les jours, avec les personnes qui m'entouraient, et cetera, et cetera… je n'avais pas le droit d'être extravagant ; parce que sinon je me faisais bully, parce que sinon je me faisais insulter. Et donc, le théâtre, c'était un cadre où j'avais le droit d'être extravagant. Parce que c'était drôle. Parce que c'était un espace qui faisait que j'avais le droit. Les personnages faisaient que j'avais le droit. Et il fallait, en fait. Et donc, voilà, mes Profs de théâtre m'adoraient. Parce qu'en fait, j'avais plus de barrière à ce moment-là.

La Queenterview : Et ça a duré longtemps ?

Esther : Oui, bah… ça a duré jusqu'à la fin du lycée. Et après, quand je suis passé en école de cinéma, du coup, oh my god, j'ai arrêté le théâtre parce que je voulais vraiment me concentrer sur l'école de cinéma et faire du bon travail.

La Queenterview : OK ! Et qu'est-ce que tu retrouvais dans le cinéma qui te plaisait, qui te donnait envie et qui t'a donné envie d'en faire ton métier ?

Esther : Moi, c'était « raconter une histoire ». Je voulais mettre en scène des choses, faire passer des émotions, raconter une histoire. Et ça, enfin, même dans le Drag aujourd'hui, dans le théâtre à l'époque, dans le cinéma tout le temps, ça a toujours été mon objectif. J'ai des histoires à faire passer. J'ai des émotions à transmettre. Et j'aime beaucoup le storytelling et comment est-ce qu'on met en place des choses pour faire ressentir quelque chose au spectateur et le… le plonger dans une atmosphère.

La Queenterview : Et c'est quoi les histoires que tu avais envie de raconter en commençant ton école de cinéma ?

Esther : Le tout premier court-métrage que j'ai réalisé, c'était une histoire de coming out, oh my god ! Et ensuite… euh… le tout dernier film que j'ai réalisé, parce que… enfin, voilà, j'ai réalisé un des films de fin d'études de l'école… ça parlait… en gros, c'était aussi du coming out, mais c'était un petit peu plus élaboré, un petit peu plus discret, un petit peu mystique. Enfin, j'ai l'impression que tous les films que je fais en ce moment, ça parle de coming out, mais un jour j'arrêterai, promis.

La Queenterview : D'ailleurs, ton coming out à toi, ça s'est passé comment ?

Esther : Euh…

Esther feint la gêne.

Esther : Oui, ce fut une surprise pour everybody, parce que ça n'était pas du tout prévu. Alors, je vais vous faire… Alors attention, c'est le moment pour moi de raconter une histoire, donc on va mettre tout ça en place, c'est reparti pour le ASMR.

La Queenterview : OK ! L’histoire du coming out d’Ivän.

Esther chuchote.

Esther : Attention, accrochez-vous à vos baskets parce que vous n'êtes pas prêts.

Esther cesse de chuchoter.

Esther : En gros… non, je vais repasser « en pas ASMR ». En gros, je fais le setting : c'était au lycée, je devais être en Première. Je commençais vraiment à comprendre ma sexualité, assumer un petit peu plus mon côté féminin, mais genre vite fait, tu vois. Et donc on est partis en vacances avec mes parents. Je sortais avec un mec à l'époque, donc on discute, on discute, on discute. Bref, on s'engueule par messages, ça faisait deux mois qu'on sortait ensemble. J'étais en mode « vas-y parle à ma main ! ».

Et donc j'essaye d'en discuter avec mes potes par message, bla bla bla. Pendant ce temps, on est dans un chalet dans les Alpes avec mes parents, donc complètement bloqués du reste du monde. Donc c'est super le setting, tu vois. Et là, entre deux meilleurs potes, je fais des « copier-coller », tu vois, comme ça je n’ai pas besoin de… machin… sauf que mauvais « copier-coller », j'ai envoyé un message à mon daron, voilà, où ça exprimait clairement que je sortais avec un mec. Moment de panique, je cours dans le salon, je fais « papa, ce message n'était pas pour toi », et je le vois en train de regarder le message mode « d’accord ».

Et donc voilà, le soir même, on a eu droit à « il faut qu'on parle ». Et bon, bref, j'ai eu droit à tous les clichés en mode... La première question qu'ils m'ont demandée, c'est « est-ce qu'il avait plus de 30 ans ? ». Et je suis en mode « ah, ben non… mais ok, super ». Et là, ils ont commencé à dire « ah là là, les MST », tout ça, « machin ». Je suis en mode « oui, mais bon, tu es mignon », tu sais, « je suis sorti avec une meuf avant ça ». Oui, je suis sorti avec une meuf, oh my god. « Vous ne m’avez jamais parlé de MST ». Donc c'est très drôle que maintenant que je sors avec un mec, on me fait la leçon de vie sexuelle, tu vois. Donc, bon, bref, j'ai eu le droit aux trucs clichés.

Et après, bon voilà, j'ai eu le droit aussi au moment où mon père cesse de m'adresser la parole pendant 1 semaine. Donc ça, c'était très fun parce que ma mère aussi, du coup, s’est joint un peu à la partie, mais du coup, c'était toute une semaine où en fait j'ai échangé deux mots avec mes parents, voilà. Je n’avais pas le droit de manger dans la même salle, je n'avais pas le droit de... Enfin voilà, je rentrais, je m'enfermais dans la chambre et puis je n'avais rien… rien le droit de faire, quoi.

La Queenterview : Tu l’as vécu comment, ça ?

Esther : Très mal parce que… avant ça, je m'étais toujours posé la question… tu sais, enfin tu te demandes comment est-ce que tes parents vont réagir, mais je suis un peu optimiste du coup, moi dans ma tête j'étais en mode « je suis sûr que ça va aller, je suis sûr que ça va aller ».

Et en fait quand je me suis rendu compte que ça n’allait pas, j'étais en mode « ah merde »« c'est pas du tout ce que j'avais imaginé », parce que du coup je m'étais projeté dans quelque chose de beaucoup plus positif et j'avais mis beaucoup d'espoir sur mes parents, qu’ils réagissent de façon positive ; et quand ça ne s'est pas produit, je suis en mode « putain, merde, je me suis complètement gouré ». Et c'était con, tu vois, mais... Donc ça a été très difficile, mais il faut quand même que je précise que maintenant ça va vraiment beaucoup, beaucoup mieux.

Ce qui s'est passé, c'est que mon père, il vient d'un petit village en Angleterre. Il avait... Enfin, c'est un… it’s a man's man, tu vois. Il aime faire du bricolage, rénover des longères, faire de la moto, et cetera. Donc déjà, je pense que ça a été très dur pour lui d'avoir son seul fils… ne kiffer aucune de ces choses‑là. Et en plus de ça, il y a eu ce... bah, voilà, un petit peu ce clash de mentalité qu'il a fallu qu'il digère, et cetera.

Mais maintenant, ça va beaucoup, beaucoup mieux. Il… enfin voilà, j'ai un copain maintenant depuis 2 ans. Oh là là, my god, she’s so lucky !

La Queenterview rit aux éclats.

Esther : Et il le connaît. Il l'a rencontré. Ça s'est très bien passé. Il a rencontré les parents, et cetera. Quand je téléphone, il fait « ah, il va comment ? », « vas-y, fais-lui des bisous », et cetera. Donc ça va beaucoup mieux.

Mais je pense que c'est pour beaucoup de parents d'une certaine génération. Il y a un temps de digestion qui est nécessaire. Malheureusement, c'est nécessaire. C’est aussi… enfin, c’est difficile pour eux, mais c'est aussi très difficile pour nous. Donc ça met tout le monde dans l'embarras. Donc je suis très content de voir les mentalités évoluer pour les futures générations.

Mais bon, après, je n’ai toujours pas fait mon coming out Drag. Donc on verra à ce moment-là.

La Queenterview : Spoiler alert, on en parle tout à l'heure.

Esther chantonne un jingle pour marquer le suspens.

La Queenterview : Nous avons, dans La Queenterview, une Assistante Editoriale. Enfin, « on » c'est moi, clairement. J'ai une Assistante Editoriale, une Reporter de l'extrême. Elle m'aide à préparer l'émission. Elle s'appelle Mia. Elle est accompagnée de ses parents. Elle enquête sur les artistes Drag que je reçois. Bon, elle a fait sa rentrée cette semaine, ça s'est très bien passé. On lui souhaite déjà une bonne rentrée, une bonne nouvelle année, Mia.

Esther : Bonne rentrée !

La Queenterview : Elle est chez les Moyens, si je ne me trompe pas. Et, bon… Elle a quand même quelques questions. Mia, c'est une grosse fournisseuse de questions. Elle a des questions best of. Donc, on va lui dire un petit « bonjour ». Comment ça va, Mia ?

Mia : Bonjour, je m’appelle Mia. J’ai 4 ans tout court. Je fais encore la sieste l’après-midi.

La Queenterview : Et alors là, spoiler alert, je suis vraiment désolé. Breaking news, elle ne fait plus la sieste l'après-midi.

Esther : Oh non…

La Queenterview : Bah si, on m'a dit « elle ne fait plus la sieste l'après-midi ». Donc là, c'est fini, chez les Moyens, on ne fait plus la sieste l'après-midi.

Esther : Mais moi, je fais la sieste l'après-midi.

Esther rit aux éclats.

La Queenterview : Eh bah, tu n'es pas chez les Moyens.

Esther : Merde.

La Queenterview : Et voilà, désolé.

Donc, Mia a une première question pour toi.

Mia : C'est quoi une « Grag Queen » ?

La Queenterview : C'est quoi une Drag Queen selon toi ?

Esther : Alors, je suis désolé mais elle a dit une « Grag Queen ».

La Queenterview : Elle a dit une « Grag Queen ».

Esther : Donc, je vais répondre à cette question. Mia, qu'est-ce qu'une « Grag Queen » ? C'est une question qui est très difficile à répondre, surtout de nos jours. Parce que ça veut dire beaucoup plus que ça ne voulait dire à l'époque. Avant, voilà, « Drag Queen », c'était un homme qui s'habillait en femme et qui faisait le show, bon, voilà, et cetera, machin. Mais, sauf que maintenant, ça ne veut plus du tout dire ça. En plus, maintenant, on parle « d'artistes Drag » parce qu'il y a Drag Queen, Drag King, Drag Créature, Drag Club Kid, et cetera.

Il y a tellement de choses, en plus, que « Drag Queen ». Mais pour moi, le Drag… je vais plutôt aller sur ça. Le Drag, pour moi, ce sont des personnes qui utilisent des techniques artistiques pour créer une exagération. L'exagération d'une femme, l'exagération d'un homme, l'exagération de quelque chose d'artistique. Ils créent une exagération sur leur personne. Et ensuite, ils en font une performance ou non. C'est là, aussi, où il y a plein de différents types de Drag. Il y a ceux qui font purement esthétique, performances, et cetera. Enfin, il y a vraiment de tout. C'est avec de tout qu'on fait un monde.

La Queenterview : Woaw !

Esther : God.

Esther rit aux éclats.

La Queenterview : Avec une conclusion comme ça, on ne peut passer qu'à la question suivante.

Mia : Pourquoi tu es Drag Queen ?!

La Queenterview : Alors, elle l'a dit. Je suis désolé, Mia, mais tu l'as un peu dit de manière agressive quand même. Je veux bien qu'on réécoute la question ; mais sur un autre ton, Mia, s'il te plaît.

Mia : Pourquoi tu es Drag Queen ?!

La Queenterview : Bon, bah je vois qu'elle n'a pas envie de changer de ton. Donc, pourquoi tu es Drag Queen ?

Esther : Pardon, pardon, je m'excuse.

Esther : Écoute, déjà, je pense que devenir un Drag Queen, pour toutes les personnes qui font du Drag, comme dirait le fameux bouquin, it's « A Series of Unfortunate Events ». J'adore la scène. J’adore exprimer la scène et j'adore tout ce qu'il y a d'artistique autour de ça. La mode, le maquillage, enfin voilà, tout l'aspect « performances ». Il y a vraiment quelque chose d'assez incroyable là-dedans. Mais aussi, il y a l'aspect communautaire du Drag, du public Drag qui vraiment propulse… enfin, propulse l'art, quoi.

La Queenterview : Mia avait une autre question, mais pour le coup, ça ressemble assez à celle-ci, sauf si tu as envie de rajouter quelque chose.

Mia : C'est quoi que t'aimes le plus quand tu es Drag Queen ?

Esther : Moi, c'est les compliments.

Esther rit aux éclats.

La Queenterview : C'est vrai ?

Esther : Ah, bah écoute, on ne fait pas ça pour rien, hein. Ah bah les compliments, ça fait toujours plaisir. Enfin, ça veut dire que tu fais un good job, tu vois. Parce que si tu performes dans le vent, bah c'est bien mignon, mais bon, du coup, ça ne sert un peu à rien.

Et effectivement, avoir les compliments, bah c'est toutes ces heures de travail, toutes ces années de travail, tous… mais non, c'est pour ça que je traînasse toujours dans le public… Enfin voilà, si jamais dans une grande salle, vous me voyez faire semblant de chercher quelqu'un, j'attends juste que les gens viennent me voir pour me faire des compliments.

Esther rit aux éclats.

Esther : Il n'y a pas de secret.

La Queenterview : Ça, c'est une info que vous ne connaissiez pas sur Esther et que vous venez de découvrir aujourd'hui. Allez lui parler. Allez lui dire qu'elle est merveilleuse, qu'elle a un cul formidable. Elle adorera ça.

Mia, une nouvelle question.

Mia : Euh… je n’en ai plus d’autre. Je suis désolée.

La Queenterview : Elle n'en a plus d'autre. Elle est désolée.

Merci beaucoup Mia et merci à tes parents, Alice et Gilles, de t'avoir permis de te poser toutes ces questions. On t'embrasse. On te souhaite une bonne rentrée, une bonne année scolaire.

Esther : Bisous, bisous, bisous, bisous, bisous !

Mia : Gros bisous !

Esther, enthousiaste : Ouais !

La Queenterview : Gros bisous, salut Mia.

Donc, on a parlé d'Ivän. On va parler maintenant d'Esther.

Esther : Cette connasse.

La Queenterview : Pour juste récapituler, tu as découvert le théâtre, tu as beaucoup aimé le théâtre, ensuite tu t'es intéressé, un peu en parallèle… mais le cinéma a pris beaucoup plus d'importance pour toi. Tu as fait une école de cinéma en laissant un peu le théâtre de côté. Et du coup, comment tu découvres le Drag, l'art du Drag et la scène Drag ?

Esther : Eh bah… c'était ma dernière année d'école de cinéma.

La Queenterview : Elle était où, cette école de cinéma ?

Esther : À Nantes… Voilà, big up à mes Nantais. Voilà, la dernière année de l'école de cinéma, j'ai découvert RuPaul's Drag Race. Avant ça, j'étais en mode « non, je ne regarde pas », « je ne suis pas comme les autres gays, je ne regarde pas RuPaul's Drag Race ». Eh bah, j'ai commencé, j'étais en mode « ah, d'accord ».

Et aussi dans ma promo, il y avait ma maman Drag, maintenant, qui faisait du cabaret transformisme à Angers. Et après, il m'a dit « écoute, on organise un truc à la fin de l'année scolaire », « tu devrais faire », et cetera. Donc je me suis lancé. Je l'ai fait.

La Queenterview : C'était évident.

Esther : Bah… je ne sais pas. Je ne me souviens plus trop du processus mental qui s'est passé à l'époque, mais moi je suis très... « on se lance ». Je suis très « ok, d'accord, c'est bon, c'est parti ». Enfin, les nouvelles expériences, comme ça, c'est ce qui forge une personnalité. Donc je suis très « bon, allez go, c'est parti, on va faire ça ». Et quand il m'a proposé, j’étais en mode « allez, c'est parti ».

Donc bon, je ne sais pas, on a répété chez lui. J'ai acheté des trucs. J’ai acheté une perruque, talons. On a fait du shopping à Zara, et on a répété des numéros. Et après, on a fait ça. Enfin, du coup, c'était la première fois aussi que je traînais vraiment avec des Drags. Donc je me suis rendu compte à quel point c’étaient des connasses.

La Queenterview et Esther rient.

Esther : Et enfin voilà, faire les numéros... enfin bon, mon tout premier numéro… en plus ils m'ont mis en ouverture du show. Voilà la bonne idée. Mon tout premier numéro Drag, du coup, j'ouvrais le show et j'ai fait Welcome to Burlesque, dans une perruque ultra longue synthétique que je n'arrêtais pas de manger. C'était horrible.

La Queenterview : Parce que… qu'est-ce qu'on peut dire sur la perruque synthétique, quand on est Drag ?

Esther : N'en achetez pas des longues, si vous voulez… Sauf si vous voulez les coiffer ; parce que en fait, c'est impossible à garder long synthétique. Ça s’emmêle. Ça fait des nœuds. C'est horrible. Donc, premier conseil à toutes les Baby Queens out there : c'est la première chose qu'on fait, I know that, tu t'achètes une perruque longue synthétique. It's the worst idea ever. Parce que dans tous les cas, tu vas la couper.

La Queenterview : Et alors, cette première performance, elle… excepté le fait que tu aies mangé du plastique pendant tout le show. Comment ça s'est passé ? Comment tu t'es sentie ?

Esther : Ça s'est passé super bien. Et en fait, c'était pour moi le retour sur scène. Parce que ça faisait trois ans que, du coup, je n'avais pas fait de théâtre, avec l'école de cinéma. Donc c'était vraiment mon retour sur scène. J'ai fait un sketch, et cetera, donc…

Et après, je ne sais pas. Je ne vais pas dire que j'ai eu un déclic ou un truc, machin. C'était vraiment beaucoup plus graduel que ça. Mais je pense qu'au fur et à mesure que je me suis investie dedans, c'est aussi comme ça où j'ai appris à accepter mon côté féminin et à le canaliser quelque part.

La Queenterview : Et comment s’appelle ta mère Drag ?

Esther : Elle s'appelle Miss Monica de Font-de-Gorge.

La Queenterview et Esther pouffent de rire.

Esther : C'est moi qui lui ai trouvé la dernière partie.

La Queenterview : Quelle chance d'avoir une fille comme toi !

Esther : Et en plus, c'est trop drôle parce que vraiment, elle c'est « Miss Monica de Font-de-Gorge », le truc à rallonge, et moi c'est « Esther ».

Esther pouffe de rire.

La Queenterview : Bah tiens, d'ailleurs, on va en parler comme ça… comme ça, au moins, on se raye le sujet, on coche la case. Pourquoi « Esther » ? Comment « Esther » ? Est-ce que ça a toujours été « Esther » ?

Esther : Alors… oui, ça a toujours été « Esther ». Et pourquoi « Esther » ? Déjà, de base, au tout début, pendant mes premières deux années de Drag, je dirais, c'était « Esther Fern ».

L'année où j'ai commencé à faire le Drag, je n’étais pas hyper bien dans ma vie. Il se passait beaucoup de choses. Voilà, je venais de subir une rupture, j'avais énormément de stress avec l'école. Ça laguait. Enfin, il y avait beaucoup, beaucoup de choses. Et du coup, quand j'ai commencé le Drag, j'ai commencé avec du maquillage Club Kid, clown triste, avec les sourcils qui pleurent, et cetera, et cetera.

Et quand j'avais fait ça, c'était… quand je me regardais dans le miroir… c'était un moyen pour moi vraiment d'exprimer cette tristesse et cette frustration que je ressentais à l'époque. Parce que je suis quelqu'un qui a du mal un peu à pleurer, à exprimer ses émotions, mais donc le dessiner sur ma gueule, j'étais en mode « oh wow, c'est... », « je vois visuellement sur moi ce que je ressens à l'intérieur ».

Je me suis maquillée comme ça pour aller à Halloween et, du coup, on s'est concertés avec tout le monde en mode « oh, comment je m'appelle ? comment je m'appelle ? ». Et je voulais à l'époque un prénom qui soit un peu mélancolique, justement pour faire rappel à ça. Et il y a quelqu'un qui a proposé « Esther ». Et vu que j'adore le film d'horreur Esther, je me suis dit « bingo, c'est parti, on part sur ça ».

Et ensuite, le « Fern »… qui d'ailleurs veut dire « fougère » en anglais, donc c'est nul comme nom de famille.

La Queenterview :  Mais ça rime, « Esther Fougère ».

Esther : « Esther Fougère ».

Le « Fern », c'était parce que, à l'époque, j'avais un crush sur Cody Fern dans American Horror Story ; la saison Apocalypse, il joue l'antichrist. Et après, je me suis rendu compte… parce que le court-métrage que je réalisais pendant cette dernière année d'école s'appelle « Terre Ferme ». Es−… −terre « Fern ».

La Queenterview :  Oh là là…

Esther : Ah ouais, c’est nul hein.

Esther rit.

La Queenterview : Non, mais il n'y a aucun jugement de ma part. Je ne peux pas valider si c'est bien, si ce n’est pas bien, et cetera. Mais en revanche, je peux te dire : ça va beaucoup trop loin.

Esther : Ça va beaucoup trop loin. Et surtout : quand quelqu'un dit « je ne juge pas », il juge toujours. Maintenant, c'est vraiment juste « Esther ». On a abandonné le reste. Voilà, on est passé… J'ai brainstormé, hein. Ça a failli : « Esther Minatrice ». Enfin bref, on est passés via des étapes.

La Queenterview : Là, je le juge par exemple, et là, c'est honnête. Je suis content qu’on… enfin, « je suis content »

Esther : Bah voilà.

La Queenterview : Je suis content de ne pas avoir dit « eh, bienvenue Esther Minatrice pour ta Queenterview ». Tu vois, j'avoue que… j’avoue que je suis un peu content d'être passé à côté de ça.

Esther : Maintenant, c'est juste « Esther » et je… j'aime bien quand même ce prénom parce que je trouve qu'il a quand même une qualité un peu sensuelle. Voilà.

La Queenterview : Ça, c'est un prénom à avoir les plus belles fesses de Paris.

Esther : Exactement.

La Queenterview : Ça… ça on est bien d'accord qu'il y a un rapport entre les deux.

Tu parlais de ta première performance, et cetera. Et tout à l'heure, tu disais que ce que tu aimes le plus quand tu fais du Drag, c'est les compliments et c'est les retours du public. Qu'est-ce qu'on t'a dit la première fois qu'on t'a vu performer ?

Esther : Alors là, mais oui, dis donc, on m'a beaucoup… enfin voilà, on m'a fait des compliments, et cetera. Beaucoup de gens qui étaient en mode « oh, mais c'est ta première fois ? » ; « oui, c'est ma première fois ».

La Queenterview mime la fierté.

Esther : Avec un petit hair flip, exactement. J’étais en mode « mais ouais, c'est ma première fois »« mais non, je ne te crois pas ». Et là, du coup, il y a un mec qui est venu nous voir. Et là, alors compliment, mais incroyable : il était en mode… je vais faire avec... Non, je ne peux pas faire avec l'accent. Attends, attends, attends. Parce qu'en fait, c'est...

La Queenterview : C'est un sketch à accent ?

Esther : Ouais, c'est un sketch à accent ; mais il faut que j'arrive à...

Esther prend un accent britannique.

Esther : Ok, je vais faire un accent un peu britannique, sauf qu'il était Américain. Il était Américain, comme ça. Donc il est venu me voir, il a fait « oh, j'adore ce que vous avez fait ce soir », « franchement, c'est incroyable », « moi, je viens de New York City, et on a beaucoup de Drag Queens là-bas », « mais elles n’arrivent même pas à la cheville de ce que vous avez fait ce soir », « vous avez fait un show incroyable », « et si on avait ça à New York, ce serait tellement mieux ».

Esther cesse de prendre un accent britannique.

Esther : C'est… pour ta première fois en Drag, être comparée aux Drag Queens de New York, qui est genre l'apogée du monde Drag… Enfin, c'est là où il y a toutes les Drag Queens du monde, et être en mode « c'était encore mieux que ce qu'on a vu à New York » ; j’étais en mode « oh my god ». Alors par contre, je pense qu'il mentait, hein, mais ce n’est pas grave.

Esther rit.

La Queenterview : Et, tu sais quoi : une fois de plus, ta légende dira que la première fois que tu t'es mis en Drag, quelqu'un t'a dit « c'est encore mieux que ce qu'on voit à New York ».

Esther : Exactement. Maintenant, il faut demander : qui est-ce qu’il a vu à New York ?

La Queenterview : Ah ! Qui il a vu à New York ?

La Queenterview rit.

Esther : Qui il a vu à New York ? Hum ? Mais c'est vrai que pour débuter « tu es en mode, OK, ça va, c'est pas mal », « on fait les choses bien ici ».

La Queenterview : Est-ce que tu pourrais me décrire Esther ? C'est-à-dire quelle est l'esthétique d'Esther ? À quoi elle ressemble ? Parce que là, on peut s'imaginer qu'on est en train de faire un podcast, que les gens ont le son et pas l'image. Et donc, du coup, si on devait dessiner elle est très Esther, elle ressemblerait… elle ressemble à quoi ? Qu'est-ce qu'elle est ? Qu'est-ce qu'elle fait ?

Esther : Alors, physiquement… bah, gros cul, du coup. Je pense que nous avons déjà établi ça. Je suis beaucoup plus grande que les gens pensent. Quand ils me voient pour la première fois, quand ils me suivent sur Instagram, et quand ils me voient dans la vraie vie, ils sont comme « ah wow, tu es grande », tu vois, parce qu'avec les talons, je fais quasi 2 mètres. Donc, j’ai… enfin voilà, j'ai des grandes épaules, je suis un peu… un peu baraque, vite fait. Je suis bâtie, on va dire. Donc ça, c'est physiquement. Mais sinon, voilà, une beauté sans nom.

Mais après, je pense que Esther, c'est surtout ce que je dégage. Il y a quelqu'un qui a dit une fois, et je trouve que ça me définit très bien, in and out of Drag, que je suis « impertinente ». Et je trouve que ça me décrit très bien. Je suis très impertinente. Mais, voilà, on m'a déjà dit aussi que j'étais « intimidante ». Mais après, quand on me voit en show, je n'ai pas peur du ridicule, je n'ai pas peur d'être débile. Mais c'est un mélange de, justement, cette débilité et ce côté un peu sensuel, dominant. Voilà, c'est ça qui regroupe Esther.

La Queenterview : Elle a un côté un peu burlesque aussi, un peu très cabaret, même dans son… dans son… dans son maquillage, et cetera. C'est très show off, quoi. Elle est venue pour être la plus belle, clairement, Esther, à chaque fois qu'elle sort.

Esther : Exactement. Il n'y a pas d'autres options, en fait.

Esther rit.

Esther : Mais oui, je suis très inspirée par la comédie musicale, par le burlesque. Je suis très inspirée aussi pour le côté fashion. Je suis inspiré aussi, beaucoup, par les films d'horreur. Je gravite toujours beaucoup vers ça. Donc c'est un mélange. C’est un mélange de beaucoup de choses, mais justement, c'est les mélanges qui rendent les choses intéressantes.

La Queenterview : Pour les gens qui ne t'ont pas vu et qui viendront te voir après avoir écouté ce podcast, c'est que… on peut complètement redécouvrir et avoir une nouvelle lecture d'une chanson en te voyant la performer.

Esther : Bah, merci beaucoup. Oh ! Les compliments !

La Queenterview : Non, mais c’est vrai ! C'est vrai. Je t'ai vue performer sur Moulin Rouge. Quand tu connais la chanson, quand tu connais le film et quand tu as la « Esther version », ce n'est pas la même, ça c'est sûr.

Esther : Oui, du coup… Bah, pour expliquer, j'ai fait une version d'Elephant Love de Moulin Rouge où, pour moi, Ewan McGregor était un gros connard. Et du coup c’était… enfin, voilà… Peut-être que vous la reverrez. Mon mec adore ce numéro, donc je pense qu'il va falloir que je le refasse.

Mais oui, j'aime bien. J'aime beaucoup trouver les blagues dans… dans… dans une chanson. Avant, je faisais des mix, mais maintenant j'ai arrêté parce que j'aime juste prendre le matériel comme il est et, justement, trouver les blagues dans l’instrument… dans l'instrumentation. Est-ce que tu crées une histoire ? Est-ce que c'est juste des petits mots, et cetera, où tu crées des vannes ?

Il y a pas mal de Drag Queens qui font ça. Enfin, « pas mal »… En vrai, on n'est pas si nombreux. Je trouve que c'est un tort. L'autre Drag Queen qui, je trouve, le fait très bien, c'est Mademoiselle Kiss. Elle sait trouver la blague où il y a la blague à trouver. Très rapide aussi sur ça. Et moi, c'est ce que j’essaye de faire : trouver la blague là où on ne se dirait pas forcément qu'il y a une blague.

La Queenterview : Tu organises Le Boudoir d'Esther, donc à Paris, du côté de Bastille, une fois par mois. Bah, comment tu as eu cette idée ? Depuis combien de temps tu organises ça ? Et qu'est-ce que tu mets derrière ton concept de soirée ?

Esther : C'est un show mensuel, un mercredi soir, une fois par mois, dans le bar à Bastille. Et c'est vrai que j'aime beaucoup ce lieu, parce que même s'il est petit, au final il est très intimiste. Et j'essaye de, vraiment, apporter un côté « cocon » à ce show, qu'on soit tous ensemble, je discute avec le public, je fais des blagues, je fais du stand-up, on fait des jeux, on participe. Voilà. Quand les gens vont boire en haut, bah je les rejoins.

La Queenterview : Pour avoir des compliments.

Esther : Pour avoir des compliments, toujours.

La Queenterview : Ce qui m'a plu aussi, c'est que j'ai vu quelque chose qu’on ne voit pas forcément souvent, il y a très peu de Drag qui le représente, mais un Drag un peu « horrorifique », avec Vilaine. Et j'ai trouvé ça très bien. Alors, je suis pas du tout film d'horreur, je n’aime pas ça, et cetera, machin. Mais j'ai trouvé ça chouette de voir quelque chose qu'on n'a pas l'habitude de voir et qu’on ne voit pas partout.

Esther : Mais après, en parlant de film d'horreur, on peut très bien parler de Vajinette aussi, parce que franchement son make-up...

Esther rit aux éclats.

Esther : Mais ouais, du coup, il y a Le Boudoir.

Et du coup, en autre show, pendant un an et demi, j'ai produit le show La Casse-Noisette avec Velma Velour, qu'on faisait dans un théâtre proche de Montparnasse. Et donc c'était un show qui se déroulait tous les deux mois. On a eu beaucoup d'artistes différents sur cette scène. Il y avait vraiment une qualité très théâtrale à ce lieu et à cet événement.

Et j'ai le plaisir de vous annoncer que nous allons reprendre à partir de début novembre dans un nouveau lieu, dans un nouveau format. On garde l'esprit de La Casse-Noisette, mais sauf qu'on agrandit, on le rend plus grand, plus dramatique, plus extravagant et encore plus qualitatif. Donc n'hésitez pas à aller suivre la page de La Casse-Noisette pour vous tenir au courant.

La Queenterview : Il y a de quoi être fourni entre Le Boudoir d'Esther et La Casse-Noisette, plus les performances que tu fais à droite, à gauche.

Esther : À droite et à gauche, à Orléans. Enfin là, on fait un petit peu le tour de la France maintenant.

La Queenterview : Eh bah, c'est très bien ! Dans tes shows Drag, tu parlais de quiz. En fait, c'est des quiz autour de quoi ? Quel est le but de ces quiz ?

Esther : Ouais, donc, ça, c'est quelque chose que j'ai rapidement voulu installer dans Le Boudoir d'Esther. C'était le quiz « Culture Queer ». Je trouve qu'on peut en apprendre beaucoup de choses. Il y a énormément de choses qu'au sein de la communauté énormément de gens ne sont pas du tout au courant, ne savent pas d'où proviennent les choses, de pourquoi on dit ça, pourquoi on fait ça. Et je trouve que c'est très important, parce que c'est une bataille qui a été menée et qui est encore menée aujourd'hui. Et il y a beaucoup de gens qui disent, font des choses sans savoir d'où ça vient. Et je trouve ça un petit peu dommage. Donc c'est un quiz que je fais avec le public.

La Queenterview : Pour donner un exemple, par exemple, sur une de tes soirées, tu parlais du Hanky Code. Que… c'est quoi le Hanky Code ?

Esther : Alors le Hanky Code… voilà, ça c'est la toute première soirée du Boudoir d'Esther. J'ai parlé du Hanky Code. J'en ai également parlé lors d’un… lors d'une tenue. Voilà, j'en parle juste après.

En gros, le Hanky Code, c'était un code qui circulait entre les homosexuels, surtout dans les années 70, où, en gros, dans les bars et les lieux gays, tu avais un petit bandana que tu mettais dans ta poche arrière. Et la couleur du bandana et selon quelle poche tu mettais dedans, ça voulait exprimer ce que tu recherchais. Le bandana bleu de base dans la poche droite, ça voulait dire passif. Dans la poche gauche, ça voulait dire actif.

Ça exprimait également beaucoup de fétiche, de kinks, donc ça exprimait beaucoup de choses. Et je trouvais ça vraiment très intéressant, comment est-ce qu'il y avait tout un langage secret qui était formé au sein de la communauté, comment est-ce qu'on a communiqué là-dessus. Et du coup, il y a deux ans je crois, je me suis fait faire une robe par Pipa qui était entièrement faite de bandanas lavande, qui était la couleur pour exprimer que tu étais une Drag Queen. Du coup, j'avais toute une tenue faite de bandanas.

La Queenterview : Pour moi, je ne sais pas ce que tu en penses, mais aussi le Drag pour moi est fait pour ça, c'est-à-dire amener via des tenues, via des performances, de l'Histoire, raconter des choses, apprendre, éduquer. Et au final, on peut se dire, ouais, première lecture c'est qu'une tenue, mais au final non, c'est une tenue qui est faite de bandanas, qui raconte le Hanky Code, qui raconte aussi que le bandana lavande, c'était pour dire que tu étais Drag Queen. C'est aussi tous les niveaux de lecture que le Drag peut apporter, donc bravo et continuez comme ça.

Esther : Merci beaucoup, j'essaye.

La Queenterview rit.

La Queenterview : En revanche, je suis désolé Esther, mais tu aimes les quiz sur la culture queer. Du coup, désolé.

La Queenterview lance le générique de « Question Pour un Champion ». Des applaudissements se font entendre subséquemment.

La Queenterview : Question pour une Drag Queen. Est-ce que tu peux me dire quel était le langage des fleurs pour un œillet ou violette à la fin du 19ème, début du 20ème siècle ?

Esther : Alors… oui, je peux vous le dire. L'œillet, euh… c'était une fleur qui… enfin, qui maintenant représente, un petit peu, l'homme homosexuel.

Ça a été démocratisé, on va dire, par Oscar Wilde, qui, au lancement d'une de ses pièces de théâtre, avait donné cette fleur à son acteur principal et ensuite a décidé de donner à tous les hommes de la pièce. Et au fur et à mesure, l'œillet vert est devenu un peu un symbole de l'homme homosexuel. Mais ce qui est très drôle, c'est que quand les gens ont demandé à Oscar Wilde pourquoi il avait fait ça, il a fait « je ne sais pas ». Donc c'est tout un symbole qui ne vient de rien du tout.

La Queenterview diffuse un extrait de Lova Ladiva qui dit « correct ». Cet extrait est issu de l’épisode 8 de la saison 2 de Drag Race France, occasion à laquelle Lova Ladiva a revêtu son personnage de Lova Boccolini.

Esther : Et la violette, si je ne m'abuse, ça vient de Sappho.

La Queenterview diffuse un extrait de Lova Ladiva qui hurle « correct ». Cet extrait est issu de l’épisode 8 de la saison 2 de Drag Race France, occasion à laquelle Lova Ladiva a revêtu son personnage de Lova Boccolini.

Esther : Très bien… Donc ça vient de Sappho, donc Sappho, qui était une poète de l'antiquité grecque, qui a écrit beaucoup de livres sur, justement… enfin, avec des thèmes un peu saphiques, « saphique » qui vient de « Sappho », justement, donc des histoires lesbiennes.

Et il y avait un passage en particulier où elle décrivait des femmes sur une île qui étaient entièrement vêtues de robes faites de violettes. Et justement, durant cette époque, pareil, un peu en même temps qu'Oscar Wilde, et cetera, la violette était devenue le symbole des femmes lesbiennes et il y avait un petit peu une sorte de tradition de… offrir une violette à sa concubine comme déclaration d'amour. Voilà.

La Queenterview : Exactement.

Esther : Oh my god, she knows shits.

La Queenterview : Moi j'ai envie de dire « bravo », c'était vraiment ça. C'est se montrer un peu leur amour… leur amour interdit. Ok, bon, vous avez vu que si vous avez envie de savoir des choses sur la culture queer, il faut aller voir Esther au Boudoir d'Esther. Bravo Esther !

Esther : Merci.

La Queenterview lance le générique de « Question Pour un Champion ».

La Queenterview : Tu as eu chaud.

Esther : Eh, franchement, ouais.

La Queenterview et Esther pouffent de rire.

Esther : Regarde comment j’ai chaud !

La Queenterview : Ah oui, tu as sué du genou.

Esther : Oui, c'est super. Non, mais, c'est parce que je suis comme ça depuis tout à l'heure.

La Queenterview : Regarde-moi aussi, mais je ne sue pas du tout.

Esther : Oui, bah, parce que tes genoux, ils ne sont pas couverts, donc on ne peut pas le voir.

La Queenterview : Je suis habillé. J'ai juste un short.

Esther rit aux éclats.

La Queenterview : Comment tu as annoncé à tes parents que tu faisais du Drag ? Parce que tout à l'heure, on en a parlé un petit peu, et tout, donc a priori, il y avait une histoire là-dedans. Comment tu as dit à tes parents que tu faisais du Drag ?

Esther : Alors, mon père n'est pas au courant, donc ça, c'est une histoire encore à venir. On refera une Queenterview quand ce sera passé.

La Queenterview : Avec lui !

Esther : Ouh là, god damn. Mais je l'ai dit… je l'ai dit à ma mère.

La Queenterview : Il y a longtemps ?

Esther : Il y a… il y a un an maintenant. Il y a environ un an. En fait, je commençais à en avoir marre, parce que pendant un moment, je ne pouvais pas parler de mon copain, je ne pouvais pas parler du Drag à mes parents. Et en fait, je faisais des coups de fil où j’étais en mode « mais, en fait, je n’ai rien à vous raconter parce que je ne peux pas vous dire ». Donc ça m'a énormément frustrée.

Et, au bout d'un moment, je me suis dit « j'en ai marre », « j'ai envie de partager ça avec vous », parce que j'avais beaucoup de réussite dans ce milieu-là, beaucoup de fierté dans ce que je faisais. C'est dommage que mes parents ne soient pas au courant et qu'ils ne puissent pas partager ça. Donc je l'ai annoncé à ma mère, dans un… voilà, dans un petit restaurant.

Je lui disais « bon, alors est-ce que tu te souviens de quand j'ai dit tous ces trucs de régie que je faisais ? », « je ne fais pas du tout de régie », « je m'habille en femme et je fais le clown ». Bon, elle avait beaucoup de questions. Euh, mais des questions…

La Queenterview : Mais quand tu lui dis ça, elle fait « gouloups » ou elle fait « oh ! » ? (ndlr : l’onomatopée « gouloups » est supposée manifester la gêne.)

Esther : Non, elle a fait « euh… je m'en doutais ».

Esther rit aux éclats.

La Queenterview : Ah ouais ?!

Esther : Bah, en fait… alors ça, c'est vraiment la connerie. En plus, je ne l'ai toujours pas changé. C’est que j’ai toujours… Mon compte en banque, c'est mon premier compte en banque, auquel elle a accès. Et du coup, en fait, elle reçoit les relevés par la poste. Donc elle a vu toutes mes rentrées d'argent, de shows, de brunchs et de trucs et de machins ; et du coup, mes dépenses AliExpress et Amazon, et perruques, machin.

Donc elle était en mode « non mais je m'en doutais un petit peu », « ah, d’accord, ok ». Mais après, elle a eu plein de questions différentes, enfin des questions naturelles : « est-ce que tu veux être une femme ? », et que « machin ». Je suis en mode « non, ce n’est pas ça ». Donc on a eu toute une conversation également sur la transidentité. Une question qui ne me concerne pas, donc c'était difficile à exprimer, mais je pense lui avoir expliqué du mieux que je pouvais.

Et après, j'ai fait l'erreur de la vie. C'est que j'ai voulu lui montrer un show Drag pour lui dire. Et en plus, vraiment la connerie… C'est que le soir où je lui ai annoncé, il y avait La Blu·e Velvet, qui est un show très adapté pour montrer à ses parents de quoi, le Drag, il en retourne. Sauf que c'était trop short niveau timing. Donc j'ai choisi d'aller voir un show le lendemain soir, qui était un showorganisé par Miss Manly B.

La Queenterview : Donc, en gros…

Esther : Oui.

La Queenterview : … pour situer…

Esther : Oui.

La Queenterview : … donc, tu annonces à ta mère que tu fais du Drag.

Esther : Oui.

La Queenterview : Et pour lui dire… pour la rassurer, pour lui expliquer un peu ce que c'est, pour lui mettre un peu des images en tête de ce qu'est le Drag, tu t'es dit « tiens, la meilleure occasion, et la chose la plus concrète pour elle, c'est d'emmener directement un show Drag ».

Esther acquiesce.

La Queenterview : Donc, tu l'amènes à un show Drag.

Esther : Exactement. Show Drag que du coup… toutes les performances, les gens ont fini complètement à poil.

La Queenterview pouffe de rire.

Esther : Complètement à « oilpé » et j'en avais marre. Mais en plus, ce qui était drôle, c'est qu'il y a ma meilleure pote qui est venue avec nous pour, bon, apaiser l'atmosphère et tout ça… et on était en train de rassurer ma mère. Et ma pote a sorti le plus gros mytho ever, juste pour prendre ma défense elle était en mode « ah non, mais lui, quand il fait du Drag, il ne se déshabille jamais »,« le plus que je l'ai vu enlevé, c'était un gant ». Alors que…

La Queenterview : Nan, mais alors, enfin… C’est un mensonge, hein.

Esther : C'est totalement un mensonge. Je suis constamment à poil. Mais on était en mode « non, non, je ne fais pas ça », « non, mais arrête, je ne fais pas ça », « c’est faux, hein », « franchement, moi, je suis sage ». Et, oh là là… on est partis à l'entracte parce que j'étais en mode « non, mais ce n’est pas possible ». Et je n’arrêtais pas de dire à ma mère « non, mais ce n’est pas que ça », « ce n’est pas que ça ».

La Queenterview : Mais est-ce qu'elle a dit quelque chose ? Parce que j’ai l’impression que toi tu rassures ta mère, ta meilleure pote rassure ta mère, mais ta mère…

Esther : Bah, ma mère, elle était en mode « bah en fait, je n’ai pas de souci avec le truc en soi », « c’est juste, ce n’est pas le genre de chose que j'ai envie de regarder avec mon fils », « ce n’est pas le genre de chose que j'ai envie d'imaginer mon fils faire ». Donc le truc, en tant que tel, elle s'en fout.

Mais c'est tout le rattachement derrière. J’étais en mode « putain, mais quelle connerie ». Mais ça, c'était il y a un an et depuis, on en parle beaucoup. Dès qu'on est tous les deux, elle me soutient beaucoup. Donc c'est vraiment très adorable.

La Queenterview : Et elle sait que, du coup, ton nom de Drag c’est « Esther ».

Esther : Oui, mais elle n’a jamais vu de photo. Elle n’a jamais vu de photo.

La Queenterview : Donc elle ne t’a jamais vue performer non plus.

Esther : Non, elle ne m’a jamais vu performer. Elle n’a jamais vu de photo. Elle ne sait pas à quoi je ressemble en Drag, mais ça c'est un choix que je peux comprendre totalement. C'est que, vu que mon père n'est pas au courant, elle n'a pas envie d'en savoir trop. Parce qu'elle trouverait ça... comme une sorte de trahison envers mon père. Ce que je peux comprendre.

La Queenterview : Tu as envie d'en parler à ton père ? Tu as envie que ce soit elle qui en parle à ton père ? Tu as envie que… tu aimerais que ça se passe comment ?

Esther : Non, non. J'ai envie d'en parler à mon père. C'est juste… j'attends un petit peu le bon moment pour lui en parler.

Mais la chose que je ferai totalement différente par rapport à mon coming out en tant qu’homosexuel, c'est que mon coming out en tant que gay, c'était encore le début, je ne savais pas trop, j'avais peur de sa réaction, et cetera. Sauf que là, je vais débarquer en mode « bah en fait, c'est ce que j'aime », « I'm successful at it », « c'est à toi de l'accepter, basta », en fait, « je ne fais rien de mal »,« donc, si tu as un problème avec, c'est ton problème, ce n’est pas le mien ». Et j'espère que ça se passera bien.

Esther rit.

La Queenterview : Et on espère aussi que ça se passera très très bien. C'est quoi ta plus grosse fierté, ta plus grande fierté en Drag ?

Esther : Bah franchement, c'est le chemin que j'ai parcouru et où j'en suis aujourd'hui, juste au niveau de mon, entre guillemets, je mets vraiment entre guillemets mon « statut » en tant que Drag, au sein de la communauté. C'est juste que les gens savent qui je suis. Les gens respectent ce que je fais. Ils me bookent. Ils sont contents de me booker. Ils sont contents de travailler avec moi. On me rappelle et enfin voilà.

Mais c'est vraiment une fierté d’être… d'avoir réussi à s'imposer au sein de la communauté et dans le milieu. Parce qu'il y en a beaucoup qui n'y arrivent pas. Parce que c'est quand même… il y a beaucoup de Drag Queens pour moins de demandes. Il y a beaucoup plus d'offres que de demandes dans le milieu du Drags. Et réussir à avoir fait sa place et avoir le respect des gens avec qui on travaille et des autres Drags, pour moi, c'est ma plus grande fierté.

La Queenterview : On arrive bientôt à la fin de cette émission.

Avant de nous quitter, est-ce que tu as des recommandations, culture ou autres, pour toustes celles, celles, ceux et ceux qui nous écoutent ? Des recommandations de Drags, des recommandations pour les Baby Drag Queens, des recos, Esther ?

Esther : Alors, déjà un petit message pour toutes les Drag Queens qui commencent en ce moment c'est : accrochez-vous et bon courage, parce que vous êtes arrivées, un petit peu, dans le nerf de la guerre ; donc, c’est un petit peu… Je trouve que c'est beaucoup plus compliqué pour les Drags qui arrivent en ce moment de se faire une place. C'est beaucoup plus difficile. N'hésitez pas à poser des questions, à discuter avec les gens et à demander aussi des shows et tout ça, machin. Il ne faut vraiment pas oser. Mais n'en faites pas trop non plus, parce qu'il y a des Baby Drags qui en font trop et ça c'est chiant.

Et ensuite en tant que recommandation, je vais vous recommander Le Boudoir d'Esther, je vais vous recommander La Casse-Noisette, je vais vous recommander Drag’O à Orléans. C'est un show que je hoste à Orléans. C’est…

La Queenterview : Ça va de hoster tous les shows de la F−… l'hexagone ou quoi ? Laissez de la place aux autres.

Esther : Non, je n’ai pas envie.

Mais sinon il y a vraiment beaucoup de shows qui ont beaucoup de choses à offrir : La Blu·e Velvet, La Kiss My Valentine… Enfin, voilà, il y a de la qualité partout. J'ai probablement oublié des shows à voir, mais renseignez-vous.

La Queenterview : Très bien ! Eh bah, merci beaucoup, Esther !

Esther, chuchotant : Merci à toi !

La Queenterview : Est-ce que ça t'a plu ? Est-ce que tu recommandes La Queenterview ?

Esther : Pas du tout, c'est de la merde.

Esther rit.

La Queenterview : Eh bien, c'était ce que je voulais entendre.

Merci Esther et merci à toustes d'avoir suivi ce nouvel épisode de La Queenterview. En attendant de prochain, si vous avez aimé, likez l'épisode, abonnez-vous au podcast. En gros, faites tout ce que le monde moderne a fait de vous et à bientôt pour une prochaine Queenterview. Bye bye !

Esther : Bye !

La Queenterview : Salut !

La Queenterview lance son générique de fin.


Transcription : @coschaf

Pochette : @artugolini

Réalisation : Léa et Tintin

Générique : Ry'm

Questions : Mia

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